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23 avril 2024

Article LIBERATION 02/10/04

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    Autochtones. La Suède a restitué des os humains rapportés d’une expédition en Australie.
    Des Aborigènes retrouvent leurs restes

    Par Olivier TRUC

    Stockholm de notre correspondant

    Deux musées suédois ont remis jeudi à des Aborigènes d’Australie des ossements humains ramenés il y a près d’un siècle par une expédition scientifique suédoise imprégnée des thèses eugénistes en vogue à l’époque. Sept Aborigènes avaient traversé la moitié du globe pour participer à cette cérémonie qui s’est déroulée au musée d’Ethnographie de Stockholm. «Je suis tellement fier de ramener les restes de mes ancêtres sur la terre à laquelle ils appartiennent», a déclaré Peter Francis, l’un de ces Aborigènes, originaire de la région de Kimberley. «Si vous enlevez les restes humains du pays, même le pays en devient malade. Leur esprit va maintenant revenir parmi les leurs, ça va ramener la paix», a ajouté Joey Chatfield, un autre Aborigène, de Camperdown, notant que quelque 10 000 restes d’Aborigènes sont actuellement disséminés dans les musées du monde entier.

    Profanation. Ces ossements d’une vingtaine de personnes ont été rapatriés dès hier à Canberra d’où ils seront acheminés dans leur région d’origine afin d’être à nouveau enterrés. A nouveau, car ils viennent pour la plupart de sépultures profanées. Au cours d’expéditions menées en Australie entre 1910 et 1912, le zoologiste suédois Erik Mjöberg n’avait en effet pas hésité à profaner des sépultures fraîches pour s’emparer des spécimens qui l’intéressaient. Il les expédiait ensuite en prétendant qu’il s’agissait d’os de kangourous. «Il y avait un intérêt scientifique d’un point de vue de la biologie raciale en début du siècle, a commenté Anders Björklund, directeur du musée d’Ethnographie. Mais ces expéditions ne faisaient rien d’autre que de la profanation de sépultures.» Depuis que la mode eugéniste est passée, ces bouts de squelettes reposaient dans les magasins du musée, avec des centaines d’autres. «Nous ne les utilisons plus», a expliqué Anders Björklund, qui voudrait bien que tous les musées unissent leurs forces pour rendre ces ossements à leurs propriétaires. «Comme une sorte d’inventaire pour les aspects les plus grotesques de notre recherche ethnographique.»

    Crânes samis. Mais beaucoup reste à faire, en Suède même, puisque ces méthodes profanatrices ont été utilisées dès la moitié du XIXe siècle à l’encontre des Samis (Lapons), la population autochtone des pays nordiques, dont de nombreux crânes reposent toujours dans plusieurs musées de Suède. «Les Suédois rendent les restes aux Aborigènes d’Australie, alors pourquoi pas à leur propre population aborigène», s’est exclamée, remplie d’amertume, Anette Parta Puoli, de l’Association des Samis de Stockholm. La question embarrasse les responsables suédois qui affirment que des discussions sont en cours. «Mais il s’agit de trouver les bons partenaires», dit Eva Gesang-Karlström, directrice du Musée pour la culture mondiale de Göteborg.

    «Les Etats-Unis et le Canada ont rendu pas mal d’ossements et d’objets à leurs propres populations autochtones, note Per Kåks, collaborateur de l’Icom, le conseil international des musées. Mais ce processus peut provoquer des remous.» Ainsi, une polémique avait éclaté l’an dernier en Grande-Bretagne à l’idée de rendre des ossements. «Ce serait très préjudiciable. Nous verrions des pans entiers d’études se fermer à la recherche si nous perdions des spécimens clés», avait déclaré au Guardian le professeur Chris Stringer du musée d’Histoire naturelle qui dispose de quelque 20 000 restes humains dans ses caves. Mais les partisans du rapatriement estiment que la plupart de ces ossements sont relativement récents, un à deux siècles, et d’une valeur scientifique limitée à l’échelle de l’humanité. «Au lieu de voir ce rapatriement comme la fin de toute recherche, il faut peut-être le voir comme le début d’une nouvelle coopération avec ces populations», espère Per Kåks.

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